Suites sans fin

J’écris.
Toujours ces deux mots. Répétitif. Répétition.
Lettre après lettre.
Mot après mot.
J’écris. Cela me fascine. Cette feuille blanche qui se remplit, dans un égrenage de secondes. Frou frou audacieux de la main caressant le carnet.
Le temps est le miroir de mon âme.
Les mêmes mots. Les mêmes phrases reviennent. Répétition, cycle après cycle.
Schéma mental ?
Que sais-je. Je m’interroge encore et encore.
Entrainant mon esprit aux longues promenades, à travers de longues marches.
Chaque pas apporte un mot, une phrase. Construire une pensée dans la foulée.
Défoulement grotesque de ces sons crâniens, enchainement de ces mots.
Je marche et j’écris. Autant dire je suis.
Je suis.
Moi.
Je suis moi au milieu.
Je suis moi au milieu des autres.
Autre.
Capter ces tranches de vies. Et les inscrire, les graver sur mes papiers. Ici, un enfant pleure. Là, la télévision s’extasie. La fenêtre ouverte laisse échapper un soupir bien vite, si vite rompu. Trompant l’ennuie par la multitude de l’Autre. Rature, griffonnage, première correction.
Besoin intense de tromper le temps qui passe, qui se fait ressentir.
Divagation. Vague à l’âme.
Temps, miroir de mon âme. Un vieux poème me revient. Je suis seul. Seul, moi et mon âme. Connecté à la multitude et pourtant seul.
Au milieu des autres.
Cela m’affecte. En rien. En tout.
Bizarrerie de mon être.
Bifide, tel  la langue du tentateur.
Mélancolie du trentenaire. Aspiration du corps à laisser un autre de lui, un autre lui. Aspiration de l’âme à rester dans le présent. Je suis bien.
Bipolarité de ma pensée. Opposition si cher. Si chair. Chair qui se marque, n’aspirant qu’à croquer, à réinterpréter. Comme tant d’autre avant moi, ce corps unique et multiple de l’humanité. Trahison de ce corps. Je ne veux qu’être touché. Réellement touché.

Aspiration. Expiration.

Reprise du souffle. L’encre coule. La plume se relève, cherchant l’ordonnancement du prochain phrasé.
J’écris.
Sans but réel. Me semble-t-il.
Avouez, c’est une bizarrerie. Une de plus. Ecrire. Ecrire sans but.
Ecrire pour expulser. Toute ma personne n’est que ça. Enfin de compte. Accoucheur.
Projection d’énergie.
Retranscrire mon monde intérieur.
Vivre.
Faire vivre. J’ai, je me fais l’impression d’être arrogant, auto-centre, égocentré.
Miroir de mon époque ?
Bonne question.

Au centre des miennes en tout cas.

Changement de décors.
Changement d’état d’esprit.
Je me promène dans ma ville. Théâtre de mondanité. Dimanche soir.
Couples et touristes sont de sorties.
Les uns en tête à tête, éclairage chaud luminescent de la bougie. Candélabre brulant, prélude de la fenêtre.
Les autres laissent leurs pas, leurs marches, les diriger. Les digérer dans l’espace, dans le temps.
Impression rétinienne de leurs éclats.
Impression auditive de leurs joies.
Je me pose et détache le stylo de la feuille. Je me relis.

Les mots se suivent. Divagation surréaliste. A me relire, j’entends mes pensées, ces suites sans fin d’éléments qui s’entrechoquent derrière mes orbites. Qui va lire ces mots. Qui va ressentir la pulsation. La pulsion turbulente, truculente de ma rage de vivre.  Les doigts me brulent. Tout ne demande qu’à sortir, qu’à prendre le chemin sublimatoire de l’écriture.
Magie de la création.
Où comment se pencher sur un pseudo vague à l’âme, amalgame entropique d’images verbeuses.
Je me perds cette fois. Pas de but, pas de but. Pas d’idées réelles. Pas de cri du cœur.
Pas de rage ou de colère.
Juste l’envie d’écrire, d’aligner les lettres et de regarder cette plume métallique me guider.
Mes bras me brulent toujours. Je continue.
Oui, mais sur quoi ?
Ah, mais c’est une question, celle-là.
L’envie de raturer mes dernières phrases me prend. Le rythme n’y est pas. L’équilibre, cette fois, de ce dernier verset ne prend pas.
Enchainement débile de suites sans fin. . Pensée délirante autocentrée.
Mon cerveau turbine. Il fait nuit dehors. La pluie s’est arrêtée. Enfin.
Ma main se découpe en ombre chinoise sur le mur.
J’aligne ces mots, mes mots, sans réflexion.
Répétition. Le geste entraine le geste.
Respiration et pulsation. L’une après l’autre. L’une avec l’autre.
Cela me fascine.
Ce soir, je suis plein d’interrogations que moi-même je n’entends.
Vous laissant dans un brouillard intellectuel. Dépatouillez-vous avec cela.
Au moins, vous n’êtes pas dans mon crâne.
Rature de la phrase. Egoïsterie lunatique matinée d’ironie.
Je reprendrai demain.
Mes  yeux se ferment.

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